N° 160
Avril 2019
Atelier des animateurs. Photo: Stephanie Hofer
cfd Stephanie Hofer stephanie.hofer@cfd-ch.org Responsable du programme Maghreb

La transformation des conflits et la promotion de la paix font partie des objectifs transversaux visés par les projets du cfd. En partant d’une analyse des inégalités sociales, des tensions et des structures de pouvoir à l’œuvre au sein d’une société, ainsi que de leurs causes, le cfd développe ses projets de façon à ce qu’ils contribuent à la promotion de la paix – toujours selon une approche basée sur les droits humains.

Le projet Nashat – Action mené en Algérie, par exemple, s’adresse aux jeunes adultes et se concentre sur leur inclusion sociale. Le chômage des jeunes est en effet l’un des problèmes majeurs du pays. L’exclusion du marché du travail rémunéré entraîne également l’exclusion sociale, générant un sentiment de frustration et une absence de perspectives. De plus, les violences et les brutalités perpétrées durant la guerre civile pèsent toujours sur la société : c’est le cas notamment dans la région de Sidi Moussa, au sud d’Alger, où se déroule actuellement le projet et qui a été le théâtre de massacres atroces dans les années 1990.

Une violence diverse et omniprésente

Dans une société faisant la part belle à la répression et aux interdits, la violence des jeunes est dirigée non seulement contre les autres, mais aussi contre eux-mêmes. Or, ce type de violence conduit à une dégradation de l’estime de soi, de l’image de soi et de la confiance en soi.

Parmi les différentes formes de violences, la violence domestique est de loin la plus répandue. L’émigration clandestine constitue cependant aussi un phénomène dangereux, désormais bien connu sous le nom d’« el harga » ou « el harraga ». Cette expression, qui signifie littéralement « brûler ses papiers ou les lois », s’applique aux personnes qui « brûlent » non seulement leurs papiers d’identité, mais aussi leur culture, leur identité et leur origine en émigrant de façon illégale vers l’Europe via la Méditerranée. Cette pratique, particulièrement courante chez les jeunes hommes, est une réponse à la situation de blocage économique et politique dans laquelle se trouve l’Algérie. Elle reflète les craintes d’une société fragile : appauvrissement, chômage, rupture des relations sociales, perte de valeurs (notamment en matière d’éducation des enfants), violence sous toutes ses formes et dans tous les domaines.

Sensibilisation, formation et accompagnement

« El harga » est l’un des quatre thèmes abordés par les jeunes dans le cadre du projet Nashat – Action, aux côtés de la violence à l’école, des abus sexuels sur les enfants et de la violence contre les femmes. Un groupe d’animateurs a été formé dans cette optique il y a deux ans pour piloter les différentes étapes : sensibilisation, formation et accompagnement des jeunes. Afin de sensibiliser leur public au problème de l’émigration clandestine, les animateurs ont produit un film avec les jeunes (voir lien). Après les projections, ils discutent du sujet avec des élèves d’écoles professionnelles et des adolescents issus de groupes de jeunes ou d’associations comme les scouts. Le but est aussi que chaque individu construise une image plus positive de lui-même. Les ateliers de sensibilisation rencontrent un grand succès : pour de nombreux participants, c’est une occasion inédite d’avoir une autre vision du phénomène et d’échanger entre jeunes sur le sujet.

Après les premières expériences réalisées dans le cadre du projet, les animateurs ont mis au point, au début de cette année, un programme permettant de travailler avec les jeunes sur une période plus longue. Ils leur transmettent ainsi des connaissances et des capacités en matière de communication, de gestion des conflits, d’encadrement de groupes mais aussi de planification et d’organisation d’activités. L’objectif est de renforcer les aptitudes et les compétences personnelles des jeunes participants, ce qui a pour effet d’améliorer leur estime d’eux-mêmes. Ils parviennent aussi à nouer des relations amicales, prennent conscience de leurs capacités et commencent à envisager leur avenir et leur place – y compris au sein de leur propre environnement.

cfd Stephanie Hofer stephanie.hofer@cfd-ch.org Responsable du programme Maghreb