N° 158
Décembre 2018
Le conflit de l'eau en Israël/Palestine offre un cadre parfait pour des mesures de consolidation de la paix dans l'environnement. Photo de Creative Commons

Les guerres ont souvent des effets dévastateurs sur l’environnement. On pense par exemple aux vastes collines hérissées d’arbres nus au Vietnam, après que des millions de litres d’agent orange ont été déversés sur le pays. Mais l’inverse est également vrai, comme on l’observe depuis plusieurs décennies : la dégradation de l’environnement est de plus en plus une cause ou un facteur aggravant des conflits violents.

Très vite, pourtant, on a entrepris d’aborder la question en mettant à profit une caractéristique propre aux problèmes environnementaux.

La nature, en effet, ne se préoccupe pas des frontières tracées par les êtres humains. En d’autres termes, les problèmes environnementaux touchent souvent plusieurs communautés, qui peuvent être en conflit les unes avec les autres. Dès lors, les individus concernés ont de bonnes raisons de vouloir s’attaquer ensemble au problème. C’est cette idée qui a donné naissance au concept de « promotion de la paix par l’environnement ». Il s’agit de faire en sorte que des groupes divisés par un conflit mettent leurs différends de côté pour faire face à un même défi environnemental, et qu’ils dialoguent et collaborent. La gestion conjointe de forêts et de bassins fluviaux entraîne la création d’institutions communes et une amélioration progressive de la situation environnementale. Par voie de conséquence, la défiance, les soupçons et les tensions s’apaisent peu à peu, ce qui permet donc aussi de pacifier les relations entre les groupes en présence. Mais ce n’est pas tout. En renforçant les liens d’interdépendance et en établissant de nouvelles voies de communication, il semble possible de réduire la probabilité d’escalade d’un conflit. En somme, la promotion de la paix par l’environnement ouvre de fabuleux horizons : elle promet de résoudre à la fois des problèmes environnementaux et des conflits.

Aussi enthousiasmante soit-elle sur le papier, cette idée se heurte pourtant à la réalité. Pour mettre en œuvre de tels mécanismes de promotion de la paix, de très nombreuses conditions doivent être remplies. Un conflit peut être aggravé si les individus ont l’impression que les bénéfices d’une coopération transfrontière sont injustement répartis. Malgré des attentes très fortes, la coopération environnementale n’a que peu de chances d’aboutir à des formes de coopération plus larges, et le dialogue politique se limite aux aspects écologiques. Ainsi, bien que les institutions environnementales offrent des canaux de communication fonctionnels, il semble que les décideurs n’en fassent pas usage face à la menace d’une confrontation militaire. Et si les tensions entre communautés s’accentuent, une coopération est plus susceptible de prendre fin que d’apaiser la situation. Pire, les initiatives de protection transfrontière peuvent être exploitées par les États pour masquer des conflits qui portent sur des ressources minières ou des territoires, et pour justifier des actions militaires. Par conséquent, bien qu’il existe de véritables réussites, les exemples précédents montrent que les attentes en matière de promotion de la paix par l’environnement doivent rester réalistes.