Conférence MMS/aidsfocus.ch 2018: la violence basée sur le genre, approches et défis au niveau des populations et de la défense des droits

Le 2 mai 2018, le réseau Medicus Mundi Suisse a tenu sa conférence annuelle à Berne, sur le thème de la violence basée sur le genre. À cette occasion, nous avons discuté des causes fondamentales de cette violence et de solutions tangibles pour la prévenir et la réduire au maximum. Les intervenants se sont clairement exprimés en faveur d’une approche pluridisciplinaire. Bien que le mouvement #MeToo ait levé le tabou autour du harcèlement et de l’abus sexuels, une violence cachée persiste dans de nombreux pays. En raison d’un système de santé défectueux, les victimes de viol continuent de porter le fardeau de leur agression, aussi bien physiquement que psychologiquement. Par peur de ne pas être crues ou de s’entendre dire que ce qu’elles ont vécu ne constitue pas un viol, nombreuses sont les victimes qui n’entament pas d’action en justice et ne reçoivent pas de soins médicaux. Nous avons également discuté du fait qu’au sein même des organisations humanitaires, il existe des cas de harcèlement sexuel et d’exploitation du personnel. L’exploitation et l’abus sexuels dans le cadre de l’aide humanitaire et de la coopération au développement sont dus à des déséquilibres des rapports de force liés au sexisme, au racisme et à des structures de pouvoir mondiales. Il nous faut non seulement renforcer les structures organisationnelles, mais aussi nous attaquer à ces causes fondamentales, pour empêcher que toute solution ne reste réactive et superficielle.

Les rôles dévolus aux hommes et aux femmes dans les religions

Le colloque interconfessionnel organisé par Mission 21 le 5 mars 2018 sur le thème des rôles dévolus aux hommes et aux femmes dans les religions a suscité beaucoup d’intérêt.

Ahmad Mansour, psychologue et expert de l’islamisme, s’est demandé pourquoi de jeunes hommes deviennent violents au nom de l’honneur ou se radicalisent. À partir de l’étude de différents cas, il a montré des convergences dans les situations, par exemple un foyer parental patriarcal, l’absence de père ou des mises à l’écart à l’école. Ces schémas se retrouvent chez les extrémistes de droite. Il ne s’agit pas à la base de problèmes religieux, mais psychologiques. Ces jeunes personnes en quête de repères les trouvent dans ces idéologies. Il faudrait donc proposer d’autres solutions pour éviter que ces jeunes ne dérivent : organiser la prévention, soutenir les familles, favoriser l’égalité de droits entre garçons et filles et lever des tabous sexuels.

L’intervention d’Esma Isis-Arnautovic, islamologue, portait sur le thème de l’islam et du corps. Selon elle, la neutralité vis-à-vis des hommes et des femmes, l’immatérialité de Dieu et la vision positive de la corporéité humaine sont des aspects fondamentaux de l’islam. Elle a abordé de manière nuancée des thèmes concrets tels que la pureté, la menstruation, l’habillement, la sexualité et la pudeur. Amira Hafner-Al Jabaji, animatrice de l’émission « Sternstunde Religion » de SRF, a souligné l’importance des facteurs non-religieux dans les rôles attribués aux hommes et aux femmes des cultures islamiques.

Ce colloque a montré que les rôles sexués et le patriarcat ne sont pas uniquement imputables aux religions, mais sont le fruit d’interactions complexes entre culture, économie et histoire. Le psychologue Ahmad Mansour a conclu par ces mots: « J’observe que ces débats sont menés de manière très polarisée et moralisatrice. D’un côté, les religions, et en particulier l’islam, sont souvent diabolisées et présentées comme des facteurs d’oppression. De l’autre, il y a un certain angélisme multiculturel qui voudrait faire passer pour anodins des contenus religieux et des pratiques problématiques. » Il reste donc beaucoup à faire pour que l’impact des religions sur les rôles sexués, qu’il soit utile ou délétère, soit perçu de manière plus nuancée.